Présentation des quatre axes stratégiques de développement du secteur des pêches et de l'aquaculture en République de Guinée

1) - durabilité environnementale: maîtrise de l'exploitation

Ce premier axe stratégique de réduction durable de la pauvreté vise à pérenniser la ressource et rationaliser l'exploitation pour une augmentation durable des rendements et des revenus. Il repose sur les actions suivantes : Suivi - évaluation de la ressource : Tout comme les autres ressources naturelles vivantes, les ressources halieutiques sont renouvelables, mais épuisables. Pour assurer la productivité continue des biomasses, il est indispensable de connaître leurs caractéristiques (quantités, mode de vie et de reproduction, habitat, etc.) en vue de gérer efficacement l'accès à la ressource (limiter l'effort de pêche à la capacité de régénération des stocks). Une étude réalisée en Décembre 2000 sur la pêche maritime note la présence d'un potentiel halieutique important et un faible degré d'exploitation des petits pélagiques généralement destinés à la consommation locale, et par conséquent à la sécurité alimentaire des populations guinéennes. Malgré l'incertitude sur le suivi biologique consécutive à l'absence de moyens nautiques et l'irrégularité des campagnes, elle note également une tendance à la surexploitation des espèces démersales de la communauté à scianidaés. Pour arriver à l'équilibre bio-économique dans le secteur, l'Administration des pêches s'appuiera sur le suivi-évaluation et la gestion responsable de la ressource tout en mettant en place des arrangements multiformes pour disposer de moyens d'évaluation directe des différents groupes d'espèce de sa ZEE.

Le Centre National des sciences halieutiques s'y attellera en rapport avec les communautés de Pêche dans le cadre de la gestion intégrée des ressources et écosystème côtiers. Surveillance et protection de la ZEE et des eaux continentales : Une fois que les quotas et les limites de pêche sont fixés, il reviendra au gestionnaire du secteur (Ministère des Pêches et de l'Aquaculture) de les faire respecter. Le Centre National de Surveillance et de Protection des Pêches (CNSP) s'occupe ainsi du contrôle des licences, du respect des positionnements, du respect des engins de pêche et des quotas capturables. La surveillance participative des zones côtières sera conjointement assurée par les communautés de Pêches dont le poisson constitue le principal moyen d'existence durable.

Aménagement des pêcheries : L'aménagement des pêcheries tiendra à l'ensemble des mesures pour la mise en place d'un système d'utilisation durable des ressources. Ces mesures sont entre autres la réglementation de l'activité, la définition des limites de pêche, le choix des maillages, l'exécution des plans de pêche annuels, etc. Elles visent à pérenniser la ressource et les exploitations de manière à assurer les bénéfices économiques et sociaux tirés de la pêche pour les générations présentes et à venir.

Sensibilisation à la gestion de la ressource et à la préservation de l'environnement : Une gestion durable de la ressource halieutique demande la responsabilisation des communautés d'acteurs face au devenir de l'activité de pêche. Ce qui nécessite de grands efforts de sensibilisation auprès de celles-ci pour la pratique d'une pêche responsable. Les études ont ressorti une faible préoccupation des populations quant à la préservation de l'environnement. Certaines pratiques de pêche ne sont pas respectueuses de l'équilibre de l'écosystème. Les techniques traditionnelles de fumage (Fut barrique, Banda) exigent beaucoup de bois (0,92 kg et 0,6 kg de bois, respectivement, pour fumer 1 kg de sardinelle) et contribuent fortement à la déforestation de la zone littorale. Il revient au Département des pêches et de l'aquaculture de vulgariser les technologies appropriées à l'instar du four Chorkor introduit en Guinée par la FAO. Les autorités locales et Organisations Professionnelles et ONG se chargeront de sensibiliser les populations sur les nécessités de préservation de la ressource et de l'environnement dans le cadre notamment de la mise en place des aires protégés sous responsabilité communautaire.

2) - durabilité institutionnelle: appui direct aux communautés villageoises, aux opérateurs de pêche industrielle et aux organisations Socioprofessionnelles du secteur

On note avec les études réalisées, le caractère spécifique de la pauvreté des communautés de pêcheurs (faible revenu par tête, faible capacités d'accès à l'eau potable, à l'instruction et au crédit, etc.). Malgré les difficultés économiques et les problèmes d'organisation , les communautés disposent d'un grand savoir-faire en matière de construction navale, entretien des pirogues, ramendage des filets et de technologie de fumage et de séchage du poisson.

En pêche continentale, le caractère migratoire des communautés de pêcheurs rend difficile tout programme d'aménagement. La mise en œuvre du projet micro réalisation des pêches, le projet de développement de la pêche de petite envergure et le projet du Haut Niger représentent les rares interventions dans le sous secteur de la pêche continentale. Quant à la pisciculture, le potentiel de production existe, mais des facteurs limitant se trouvent sur les capacités d'aménagement des pisciculteurs et le faible soutien à la diffusion des techniques.

Pour limiter le champ d'action de ces contraintes, véritables facteurs de pauvreté, la stratégie reposera sur les actions suivantes : L'Identification participative des besoins des acteurs et élaboration de programmes de développement : On note à l'origine, plusieurs problèmes qui freinent la promotion des communautés de pêcheurs : (i) le manque de formation et d'appui direct au niveau de la profession, (ii) l'inefficacité des Organisations et coopératives de pêche et leur non reconnaissance au niveau sous-régional et international, (iii) la faible capacité de financement au niveau des pêcheurs, transformateurs et commerçants, (iv) le manque d'équipements adaptés aux besoins des professions et des nouvelles filières, (v) l'insuffisance des équipements sociaux de base, (vi) la prise en compte insuffisante des questions de genre.

Pour le renforcement des capacités des acteurs en matière d'identification et de participation à l'élaboration des programmes de développement, la stratégie envisage apporter un soutien : (i) à la création et au développement d'organisations professionnelles émanant des partenaires de la filière pêche, notamment les plus pauvres ; (ii) à la création et à l'animation de réseaux et de structures professionnelles d'échange d'expériences inter-communautaires ; (iii) à la participation des femmes dans les organisations professionnelles ; (iv) au développement des infrastructures sociales et à la mise en place d'instruments et services (financiers et autres) adaptés aux besoins du secteur ; (v) au diagnostic participatif communautaire.

Appui technique aux acteurs : La conclusion des différentes études a montré que les pêcheurs exercent leur activité dans une insécurité critique liée à la vétusté des embarcations et des moteurs, aux conditions météorologiques, au manque de professionnalisme et à l'agression permanente des bateaux de pêche industrielle.

Pour accroître la productivité de ces pêcheurs (et par conséquent leur revenus) et lutter contre leur pauvreté, l'Administration des pêches envisage leur procurer un environnement infrastructurel viable, à travers l'aménagement des débarcadères, leur équipement et leur organisation.

L'appui technique aux acteurs se fera aussi en matière de valorisation des produits, de protection et de valorisation des écosystèmes aquatiques, de mise en œuvre de la politique sectorielle etc….

Décentralisation et Appui aux organisations socioprofessionnelles (organisation, formation, équipement, réglementation, etc.) : Renforcement du rôle des acteurs par le soutien à la création et au développement d'organisations professionnelles, à la participation des femmes dans les organisations et la décentralisation du pouvoir, de l'administration vers les collectivités décentralisées, la déconcentration de l'administration, des centres vers les périphéries.

3- durabilité économique: appui à la mise en place d'une industrie nationale des pêches répondant aux normes de qualité

Si en pêche artisanale 82 % des 25 000 pêcheurs et 90 % des 2700 embarcations de pêche sont guinéens, la pêche industrielle quant à elle demeure essentiellement pratiquée par des navires étrangers opérant sous licences, cela malgré les efforts consentis par l'Etat pour promouvoir un armement national. Cette situation se traduit par un impact très limité de la pêche industrielle sur la sécurité alimentaire de la population, sur la création d'emploi et sur l'augmentation des revenus individuels des guinéens. En 1998, les captures de la pêche artisanale représentaient 54 % de la production totale (87 052 tonnes) et elle a débarqué 47 081 tonnes contre 5 191 tonnes en pêche industrielle. En dépit de la contribution directe de cette Pêche Industrielle au Trésor Public, de l'ordre de 10 milliards de fg en 2000, l'ensemble de l'impact représente environ 5% de la valeur des ressources pêchées par les bateaux étrangers. 80% des prises de ces bateaux (36 500 t) ont été directement exportées de la mer, faute d'infrastructure à terre, entraînant ainsi d'importantes pertes de recettes pour le pays.

La mise en place d'infrastructures structurantes en matière d'industrie des pêches permettra de soutenir la croissance, en maximisant notamment la création d'emploi et la valeur ajoutée nationale. Elle permettra également d'assurer la sécurité alimentaire, prioritaire à la pêche et d'accroître l'impact de la pêche à environ 40 % de la valeur des ressources pêchées.

Développement d'une industrie guinéenne des pêches (artisanale et industrielle) en adéquation avec les normes de qualité : Dans le cadre de la lutte contre la pauvreté, l'accès des couches vulnérables au marchés compétitifs est l'un des moyens de renforcer leur existence viable. L'accès à ces marchés porteurs est désormais conditionné par des mesures sanitaires qui nécessitent la mise à niveau de l'industrie guinéenne des pêches. Ces marchés compétitifs ont enregistré depuis 2 ans une augmentation de la demande de poisson d'origine tropicale de 40 %. Celle-ci pourrait arriver à 60 % dans les années à venir. Produire sans écouler, c'est comme écouler sans profit. La Guinée qui dispose d'une diversité d'espèces de poissons à haute valeur commerciale doit se positionner par rapport à ce challenge.

Mieux, travailler à réexporter de Guinée les 36 500T de poissons échappant actuellement à l'économie nationale, exige que l'on mette en place un train de mesures pour créer et / ou renforcer les trois groupes d'acteurs que sont : l'autorité compétente, les laboratoires d'assurance qualité, les établissements et armements de pêche et de traitement de poissons.

4 - durabilité sociale: appui institutionnel à l'administration des pêches (Bonne gouvernance dans la gestion sectorielle

Cet axe transversal aux trois premiers vise l'amélioration de la gouvernance en pêche, orientée vers la réduction de la pauvreté de capacité des communautés. Il concerne essentiellement : La formulation de politiques sectorielles prenant en compte les aspects ''durabilité et lutte contre la pauvreté'' ; Déconcentration et réadaptation de l'Administration de la pêche aux besoins de développement du secteur. Ce qui favorisera la mise en place d'une Administration de proximité pour maximiser l'offre de services au niveau des collectivités de base. Elle sera une administration de service qui joue le rôle de facilitateur ou d'assistant ; Adaptation de la stratégie et des objectifs aux besoins de développement : l'Administration des pêches se fixera des objectifs conformes aux besoins de développement des collectivités à la base ; et elle identifiera une stratégie adaptée aux réalités locales ; Suivi de l'activité (aspects production, transformation, commercialisation, réglementation, socio-économique, etc.) : L'administration mettra en place un système de suivi et de connaissance des différentes activités (en terme de structure et de volume) du secteur pour planifier son développement.

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